Et, bien sûr, lorsque l’on s’intéresse aux expériences spatiales « émergentes », ce que cette sociologie de l’espace viserait, ce sont bien sûr des expériences « collectives ». Mais nous le savons aussi « pratiquement » dès lors que nous pensons à ou que nous ressentons ces « passions » extrêmes que sont la claustrophobie, l’agoraphobie, le vertige, la peur de la vitesse… ou, pour prendre des passions positives cette fois, l’attrait du vide qu’expérimente le parachutiste, celui des grands espaces ou du large que recherchent l’aventurier, le randonneur, le marin… ou encore la griserie de la vitesse ou de la glisse… Là se révèle de manière en quelque sorte « épurée » ce caractère directement expérientiel de l’espace. sociologie tandis que la seconde se focalise sur un champ particulier de la sociologie : la santé. Les autres recherches feront l’objet d’une présentation synthétique de la part des membres du comité de sélection. Colloque « Penser l’espace en sociologie » Colloque organisé par le Comité de recherche « Sociologie urbaine : villes, sociétés et action publique » de l’AISLF et l’UMR CITERES (7324) – Equipe COST, En partenariat avec le Centre Max Weber et le Lab’Urba. Dans l’émotion, l’acteur n’a précisément pas de rapport objectivant à lui-même ; il éprouve, il ressent, il vit l’émotion. (2015), L’Espace, un objet central de la sociologie, Toulouse, Éditions Érès. Constatant que la pensée de l’espace en sociologie n’est ni marginale ni secondaire ni purement métaphorique, nous voulons donner un aperçu de sa vitalité. Le comité de recherche « Sociologie urbaine. Ce que nous disent les textes, c’est qu’il faut le voir non pas bien sûr exclusivement mais aussi et peut-être d’abord, dans le contexte actuel des connaissances, non comme un « cadre de l’expérience » mais comme une expérience, une expérience engageant certes des « représentations », mais aussi comme une expérience sensible, une expérience engageant le corps. DI-fusion. Et qui institue lui-même ses propres exigences, ses propres codifications, ses propres vecteurs de socialisation. Précisément, il met en jeu, dans la dynamique spatio-temporelle du déplacement, sa capacité à configurer (c’est-à-dire à mettre en forme) l’environnement dans lequel il chemine et sa motricité (c’est-à-dire, au sens phénoménologique du terme, la manière dont il habite l’espace au moyen de son corps et de ses sens) » (Thomas, 2004). Le comité de recherche « Sociologie urbaine. Mais la centralité populaire est un concept sociologique qui ne constitue bien entendu pas l’horizon des pratiques des acteurs. De Sousa Santos B. Une fois acquise l’idée que la spatialité est quelque chose qui s’éprouve dans la pratique et qui se comprend sociologiquement à partir des pratiques, la question de « l’institution de l’espace » tend à devoir être saisie à ce même niveau, en terme de coordination, d’ajustements, d’essais, de bifurcations… Bien entendu, la coordination spatiale peut dépendre de structurations formelles comme l’exemplifient le code de la route, la signalisation routière, la configuration des voies de circulation… qui ensemble constituent une « police de la route ». Lyon : Presses universitaires de Lyon, 2019 (généré le 02 janvier 2021). 7 Pour conclure cette revue rapide de la prise en compte de l’espace dans les encyclo­pédies et dictionnaires de sociologie, on peut regarder avec un certain amusement l’ar­ticle “Sociology of space”, de l’encyclopédie collaborative Wikipedia en anglais. De ces expériences autres, il faut en effet se soucier. Enfin, un appel à s’intéresser à l’espace par les usages et les pratiques en situation, en particulier dès lors que, comme c’est le cas des aménageurs, on a vocation de concevoir l’espace. Les propositions qui envisagent la question de l’espace en sociologie à partir d’autres points de vue que ceux correspondant à ces trois axes pourront être examinées avec intérêt. Elle nous revient par l’intermédiaire de chercheurs anglo-saxons, relecteurs d’Henry Lefebvre, et d’une chercheuse allemande qui propose la constitution d’une sociologie de l’espace : Martina Löw (auteure de Raumsoziologie, paru en 2007, traduit en anglais sous le titre Sociology of Space). Ce colloque vise à reprendre une question très présente chez certains pères fondateurs de la sociologie, à l’origine de plusieurs courants forts de la sociologie urbaine française, mais quelque peu délaissée depuis, celle du rapport entre sociétés et espaces. Les contenus de la revue SociologieS sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 France. Vivre un espace, faire une expérience spatiale… ce n’est pas essentiellement projeter sur cette expérience des représentations intériorisées ou subir des représentations spatiales matérialisées… Faire une expérience spatiale c’est plutôt ou aussi ce à partir de quoi, ce dans quoi peuvent se manifester, se révéler, se construire, se produire, s’activer des souvenirs, des émotions, des représentations, des désirs, des frustrations, des révoltes… Il est significatif que le texte qui, dans le Dossier, situe le plus ses réflexions dans un cadre de structures sociales globales, celui sur les mobilités pensées dans le cadre de la compression de l’espace-temps en régime de globalisation, en vienne à insister sur la variabilité, l’ouverture et l’indéterminabilité a priori des « expériences » de la mobilité. 27Sans doute les précédentes remarques n’honorent-elles pas pleinement les apports de ce Dossier. Autrement dit, la « contestation sociale » n’a pas besoin d’être thématisée, dans l’ « espace public » pour exister. 11La faiblesse d’Henri Lefebvre est peut-être que, tout en cherchant à lui accorder une place centrale, il tend à délier le vécu de l’expérience spatiale de sa dimension sensible-corporelle, en présupposant exagérément une anthropologie « représentationniste », d’après laquelle ce seraient soit des représentations, des symboles, des imaginaires intériorisés, soit des configurations spatiales extérieures saturées par des représentations idéologiques déterminées… qui induiraient, infléchiraient… notre expérience vécue de l’espace. Une consistance qui se marque par l’instauration progressive de routines, par des solidarités, des confiances accordées ou retirées, par des assurances progressivement acquises, le tout s’inscrivant dans l’espace, supporté par lui. Nous pouvons nous servir de cette notion pour poser ou approfondir un certain nombre de questions théoriques. Cette sociologie de l'espace via les représentations permet de saisir au mieux ce que sont ces espaces pour les individus qui les vivent et pour les acteurs qui les fabriquent. La pensée marxiste et la ville, Paris, Casterman. Et cela bien sûr en récusant une appréhension du territoire des émotions sur le mode essentiellement naturaliste (ce qui nous conduirait vers la psychologie ou les neurosciences) mais en prenant également distance avec les travaux de Maurice Merleau-Ponty, en particulier sa propension à « purifier » – c’est-à-dire à leur prêter un statut décontextualisé, logiquement antérieur à toute contextualisation, que les aménagements et savoirs de l’espace contribuent à transformer, à dénaturer, à médiatiser… mais à nous en déconnecter – certaines expériences spatiales intrinsèquement liées au corps, comme les expériences de la forme, de la grandeur, de la gauche et de la droite, du haut et du bas, ou encore de la profondeur. Mais on pourrait trouver des traces de ces « échecs » dans de nombreux autres textes, comme celui sur les pratiques sexuelles en milieu carcéral qui met bien évidence comment ces échecs, et les négociations qu’ils suscitent, sont au cœur de l’installation des pratiques. Peut-être ne rencontrent-elles pas totalement les intentions qui ont présidé au regroupement des différents textes. Quels sont aujourd’hui les modes de spatialisation et les espaces de la vie sociale des citadins ? Villes, sociétés et action publique » de l'AISLF organise à Tours, en collaboration avec l'université de Tours, l'UMR CITERES (équipe COST), le Centre Max Weber (Université Lyon II) et le Lab'Urba (Université Paris-Est), les 3 et 4 juillet 2014, un colloque intitulé « Penser l'espace en sociologie. Que les expériences spatiales déniées, refoulées, oubliées, oppressées se vivent dans la sensibilité n’implique évidemment pas qu’elles soient idiosyncrasiques, purement personnelles. être accompagnées des coordonnées complètes de l’auteur principal ; être envoyées par courriel aux adresses suivantes : Université de Tours - 3, rue des Tanneurs. Cette question peut notamment être illustrée par les travaux sur la stratification sociale qui s’intéressent à l’inscription spatiale des groupes sociaux et aux effets de cette inscription spatiale ; mais aussi à ceux qui mettent en évidence les dimensions spatiales de la famille, etc. C'est pourquoi la sociologie des émergences remplace l'idée mécanique de détermination par l'idée axiologique de soin (care). Voir la notice dans le catalogue OpenEdition, Plan du site – Mentions légales & crédits – Flux de syndication, Nous adhérons à OpenEdition Journals – Édité avec Lodel – Accès réservé, Revue internationale des sociologues de langue française, généraliste et ouverte à la diversité théorique et méthodologique, Les politiques urbaines en région bruxelloise, Postface au Dossier « Penser l’espace en sociologie », Publier en français dans un monde globalisé : raisons et déraisons, La consistance des êtres collectifs. Les apports et débat théoriques sont bienvenus du moment qu’ils éclairent la démarche sociologique. enser l’espace en sociologie Équipe CoST 3 et 4 juillet 2014 Université François Rabelais, Tours 3 rue des Tanneurs Amphi XXX Colloque organisé par : le Comité de recherche Sociologie urbaine : villes, sociétés et action publique de l’AISLF l’UMR 7324 CITERES (CNRS-Université de Tours)– Equipe COST L’héritage sociologique des années 1960-70 nous a habitués à comprendre l’institution sous ses formes stabilisées plutôt que sous ses formes dynamiques, processuelles. 19Plutôt que de m’intéresser aux échecs, je vais maintenant me tourner vers ce que Boaventura De Sousa Santos vise en parlant d’absence et surtout d’émergence. Intègrent-ils, et si oui de quelles manières, les apports d’autres disciplines (SHS, philosophie, mais aussi mathématiques ou physique) à leurs démarches ? [Full text]. Elements for a pragmatic of the space and the common. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2006 (généré le … 17En s’appuyant sur cette focale, la sociologie de l’espace semble pouvoir accomplir le geste que Boaventura de Sousa Santos appelle de manière générale. Un bouleversement radical de nos repères anthropologiques et des conditions de la moralité : le déclin ou la fin de l’exception humaine ? 23(1) Dans ce texte, plus que les acteurs eux-mêmes, ce sont les sociologues qui révèlent, qui mettent au jour le potentiel critique de cette centralité populaire que les acteurs étudiés se « contentent » de vivre et de pratiquer, parfois en le revendiquant. The Structuration of Spaces Through the Simultaneity of Effect and Perception », European journal of social theory, vol. 11, n° 1, pp. 25-49 - [En ligne] http://lepo.it.da.ut.ee/~cect/teoreetilised%20seminarid_2009%20sügis/4_seminar_AEGRUUM_08.12.2009/3.Loew-The_constitution_of_space-2008.pdf. Ces sociologues de l’espace, fortement inspirés par leur culture philosophique, ont eu le mérite d’affirmer qu’une théorisation de l’espace devait être au centre de la sociologie urbaine et de la sociologie en général. (4) En assumant des méthodologies en phase avec ces hypothèses, la focale sociologique tend à tourner le regard vers des expériences manifestant l’échec de ce qu’Henri Lefèbvre identifierait en terme d’espace conçu, des échecs qui se révèlent aussi ou d’abord dans la sensibilité (frustration, malaise…), mais aussi vers des socio-spatialités émergentes qui annoncent des possibles. Les contributions présentées ici ont été rassemblées à la suite d’un colloque intitulé « Penser l’espace en sociologie », tenu à Tours en 2014. Ce que nous montrent ces extrêmes nous invite à reconsidérer aussi sous cet angle les situations les plus banales, les plus habituelles. Parce que ce que font les orientations spatiales portées par l’action publique demeure toujours partiellement indéterminé, la question des pratiques et des usages revêt une importance cruciale. Les premiers « déborderaient » sur les seconds, qui seraient obsolètes du point de vue du mouvement social et spatial. À l’encontre de cette position, je me référerai aux travaux de Vincent Descombes qui préfère lui substituer ce qu’il appelle une anthropologie pragmatiste (Descombes, 2009, pp. 185-186) centrée sur l’action, sur la pratique de l’espace. Celui qui exploite cette dimension de la manière la plus « centrale » est sans doute le texte consacré à Roubaix compris comme « centralité populaire ». Le comité de recherche « Sociologie urbaine. Penser l’espace en sociologie Enjeux théoriques et pratiques de recherche Le Comité de recherche « Sociologie urbaine. Cela signifie que dans la logique de l'espace conteneur, il y a des actions en mouvement dans ou sur un espace qui est immobile (arrière-plan). Les contributions présentées ici ont été rassemblées à la suite d’un colloque intitulé « Penser l’espace en sociologie », tenu à Tours en 2014. Autrement dit, là, ce que Boaventura De Sousa Santos vise par « absence » est le plus souvent contesté par les acteurs eux-mêmes qui entendent se rendre « visibles », alors que l’expérience roubaisienne ne porte pas cette ambition. Jean-Louis Genard, « Postface au Dossier « Penser l’espace en sociologie » Â», SociologieS [En ligne], Dossiers, Penser l'espace en sociologie, mis en ligne le 16 juin 2016, consulté le 10 janvier 2021. Descombes V. & C. Larmore (2009), Dernières nouvelles du moi, Paris, Presses universitaires de France. Alors que, dans la sociologie des absences, l'axiologie du soin est mise en articulation avec les alternatives déjà disponibles, dans la sociologie des émergences, elle est mise en articulation avec les alternatives possibles. 20Là encore une précision conceptuelle s’impose. L'approche sociologique de l'espace et des phénomènes sociaux qui s'y déroulent est possible en mobilisant une sociologie particulière, celle d'une sociologie des représentations sociales des espaces urbains. 21Le concept de centralité populaire qui est au cœur du texte sur Roubaix présuppose quelque chose comme une consistance à la fois sociale et spatiale. Sans que les différents textes contestent la pertinence de ces hypothèses, leurs intérêts de recherche se situent à l’écart ou à la marge. Abstract. Pour simplifier on dit qu’il existe 2 grands paradigmes en sociologie, c’est-à-dire 2 manières de penser la société. Une consistance faite d’ajustements, de coordinations qui se jouent et se rejouent constamment. Ensuite 8 à 10 propositions seront développées par écrit (sous la forme d’un article de 40 000 signes environ remis avant la tenue du colloque, en vue d’une publication) et présentées lors du colloque par leurs auteurs. 26(3) Mais ce sur quoi je souhaiterais attirer l’attention c’est, à propos de ce texte mais aussi d’autres contributions au Dossier, cette dimension d’attention politico-éthique, cette dimension de « soin », de care, qu’évoque Boaventura De Sousa Santos. Se réfèrent-ils à des théories de l’espace qui conduisent à l’élaboration de problématiques et de méthodologies spécifiques, et dans ce cas lesquelles ? Appliqué à la sociologie, ce dualisme de l'espace et des corps implique l'hypothèse que l'espace existe indépendamment de l'action. À propos de la marche, Rachel Thomas écrit ceci : « Le rapport du passant à l’espace public urbain (qu’il prenne la forme d’une déambulation, d’une course marchande ou encore d’un vagabondage nocturne) engage, de notre point de vue, sa perception, les capacités d’expressivité de son corps et ses modes d’attention. Dans ces expériences, se nouent clairement enjeux spatiaux et enjeux socio-politiques (Dardot & Laval, 2014), en particulier dans la mesure où une des focales principales de la lutte porte sur le statut du foncier, sur son appropriation privative, la propriété privée étant la forme de « socialisation » de l’espace, liée à la logique du marché, à laquelle il s’agit de s’opposer. De l’autre, des positionnements critiques étayés sur des pratiques qui ne se revendiquent pas nécessairement comme critiques, mais qui, comme le fait remarquer Luc Boltanski dans le livre qu’il consacre à la critique, dans des expériences ou des épreuves existentielles (Boltanski, 2009). (6) Pour avoir accès à ces expériences, seule une sociologie plongeant dans l’agir, et s’y intéressant de manière patiente, paraît devoir s’imposer, un agir en contexte, en situation, un agir en commun aussi. 15Un programme dont six dimensions interconnectées pourraient transparaitre, les premières se situant en continuité avec ce qui vient d’être développé, les suivantes prenant en compte ce qui vient d’être souligné à propos de « de qui on parle ». Telle est la conviction du spécialiste de l’espace urbain Jean Remy, qui a développé au fil de sa carrière une approche méthodologique pour étudier le rôle de l’espace dans la vie collective. Les images des bidonvilles réactivent des flux mémoriels, les différentiels dans l’appréhension de la visibilité spatiale orientent les formes prises par les pratiques sexuelles en milieu carcéral, participer s’avère être certes une pratique délibérative, mais aussi une pratique spatiale… Il y aurait là sans doute des parallèles à faire avec la montée en intérêt, au sein de la sociologie actuelle, de la thématique de la subjectivation, mais une subjectivation pensée moins sur le modèle de l’identité que sur celui de l’expérience. 3À prendre le dossier dans son ensemble, on ne peut tout d’abord qu’être frappé par l’extrême variabilité d’échelle des sujets traités. Licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 France, Comité de rédaction et comité de lecture, Le contexte, les partenaires et le processus : les contraintes éthiques dans les recherches collaboratives [Full text], Un bouleversement radical de nos repères anthropologiques et des conditions de la moralité : le déclin ou la fin de l’exception humaine ?